• SOPHIE MOREAU SUR LES TRACES DE SON PÈRE

     

    Par DDK |2 août 2016 

    SOPHIE MOREAU SUR LES TRACES DE SON PÈRE

    «Je reviens à Maâtkas après 30 ans…»

     

     

    Sophie Moreau, fille de Jean-Bernard et Anne Moreau, amis de l’Algérie, revient à Maâtkas après trente années d’absence, à l’occasion du Festival de la poterie. Elle y a animé une conférence.

    La Dépêche de Kabylie : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs? 
    Sophie Moreau : Je suis la fille de Jean-Bernard et Anne Moreau qui ont sillonné beaucoup de villages berbères dont les villages de Kabylie, et qui étaient fascinés par tout ce qui était symbolique. Mon père était céramiste, journaliste et poète.

    Parlez-nous de cette amitié qui liait votre père à l’Algérie ?
    Mon père était un ami de l’Algérie et il militait pour la cause algérienne durant la révolution. Ils ont appuyé, à leur façon, l’indépendance de l’Algérie en travaillant, entre autres, pour la Société nationale de l’artisanat traditionnel (SNAT) durant plus de quinze ans.

    Votre père était céramiste, donc il est au fait des secrets de la poterie, n’est-ce pas ?
    Comme passion il avait découvert cette symbolique berbère et il a sillonné des villages à la rencontre des potières. Une symbolique véhiculée et transmise de mère en fille en Grande Kabylie, en Petite Kabylie, dans les Aurès, Mila… Il a travaillé avec ses moyens de bord. Il n’avait pas grand-chose. Il avait compris que c’est une symbolique qui représente la relation de l’homme avec les forces régulatrices cosmiques véhiculées par les peuples agraires et qui remonte à très loin dans l’histoire, depuis le néolithique et le paléolithique moyen, depuis des millénaires (6000/7000 ans).

    Votre présence à Maâtkas, à ce festival de la poterie, quel commentaire cela vous suscite-t-elle?
    Je ne pouvais que répondre favorablement à l’invitation. C’est aussi pour appuyer les efforts du commissaire du festival et de tous ceux qui collaborent pour l’organisation de cet évènement qui, pour nous, revêt une importance première pour la préservation de ce patrimoine qui n’était pas décoratif mais qui vient d’une civilisation première et qui représente la spiritualité de l’être-humain en relation avec ces forces là et qui est aussi un patrimoine national identitaire, un testament sacré duquel on peut s’inspirer pour transmettre le message de la place de l’homme dans l’univers aux générations futures pour créer des modèles de développement dans le futur se basant sur cette sagesse ! C’est aussi le thème de ma conférence : «Les symboles communs des peuples agraires : des berbères aux amérindiens», qui est aussi le titre de l’ouvrage de mon père.

    Dans ce cas de figure de création de modèles de développement dans le futur comme vous l’avanciez, quels sont les conseils que vous allez adresser à ces jeunes potières et aux autres qui n’ont pas encore mis la main à la pâte?
    Il faut reconnaître et souligner que ces potières sont les messagères de cet art symbolique. Elles ont ce rôle tellement crucial, tellement important de transmettre la signification profonde de cette symbolique aux générations actuelles et à venir. Grâce à elles, cette identité va être transmise. L’équilibre entre l’homme et la nature doit être compris et c’est sur cette base qu’on pourra influencer le développement futur, tout en préservant les ressources naturelles avec une spiritualité primordiale.

    Apparemment, vous connaissez la région ?
    Je reviens sur les lieux après trente ans d’absence. J’ai sillonné ce village quand il n’était pas encore envahi par le béton. Et aujourd’hui, je ne le reconnais plus !

    Pouvez-vous nous réciter un poème de votre père sur l’Algérie?
    Volontiers ! «Je suis celui que l’on arrête/ Que l’on suspecte et que l’on fouille/ L’homme libre qu’on emprisonne/ La main faite pour les menottes/ Je suis l’étranger qu’on rejette/ De port en port, de sort en sort/ Et qui sans jamais se fixer/ Remonte au refuge impossible/ Je suis le proscrit du travail/ Et le chassé de son village/ Frère de ceux qu’on humilie/ Et des pauvres gens qu’on torture/ Je suis le tourment du combat/ Et la force des révoltés/ Mon courage naît de ma peur/ Et de ma souffrance ma joie/ Je suis soleil, je me noie/ Dans le cri aigu des cigales/ Mais sur le pays dévasté/ Je suis le sommeil sans étoile/ Je suis le soldat sans armée/ Le combat de la misère/ Je suis la voix que l’on enterre/ Le cri qui va ressusciter!».

    Entretien réalisé par Arous Toui

     

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